Épicure – Lettres, Maximes et Autres Textes.
Comme je l’avais raconté là, la lecture de « Qu’est ce que la philosophie antique » de Pierre Hadot m’avait beaucoup plus. Et comme j’avais déjà un peu lu sur les Stoïciens, je me suis intéressé pour changer à Epicure.
Le livre
Le livre rassemble le peu de texte d’Epicure qui ont été conservés jusqu’à nous, ainsi que quelques fragments d’autres auteurs antiques qui apporte un peu d’éclairage complétmentaire sur la philosophie d’Epicure. Au total en texte attribué à Epicure, on a 3 lettres (à Hérodote, Pythoclès et Ménécée) et deux recueil de maximes.
Bon on va le dire tout de suite. Globalement j’ai trouvé le bouquin assez décevant. La lettre à Hérodote: vraiment bof, celle à Pythoclès un peu plus intéressant mais un peu longuet, celle à Ménécée: un classique assez connu finalement. La partie Maxime Capitales et Sentences Vaticanes est mieux, mais au final et par rapport au livre de Pierre Hadot, j’ai pas l’impression d’avoir forcément appris beaucoup beaucoup plus. Il y a un peu plus de détail et quelques points intéressant, mais bon c’était pas ouf.
Ce qui manque surtout je trouve c’est qu’il y a pas vraiment de mise en perspective. L’intro se concentre principalement sur des explications sur l’origine des textes, mais ne donne pas vraiment d’éclairage sur la philosophie d’Epicure en elle même. Je trouve qu’ensuite le texte manquerai aussi de commentaires ou notes, bref c’est un peu brut.
je pense que j’aurais trouvé le bouquin très bof si j’avais commencé par ça. Au final pendant toute une partie du bouquin, je me suis quand même dit « bon c’est chiant là quand même » ce qui tombe plutôt mal pour un philosophe du plaisir. Pourtant d’autres bouquins de philo antique même non introduit ou commenté m’avait paru vachement plus cool (très bon souvenir de la République de Platon par exemple).
Retour sur la philosophie d’Epicure
Bon du coup j’en profite pour revenir un peu sur la philosophie d’Epicure et quelques ajouts du bouquin par rapport à ce que j’avais raconté là
Une philosophie du plaisir
Pour Epicure, le plaisir est le but de la vie.
Le plaisir est la fin, en invoquant le fait que les animaux, sitôt qu’ils sont nés, se réjouissent du plaisir et rejettent la peine.
L’étique épicurienne se concentre sur un calcul des plaisirs. Epicure propose une classification des désirs, il y a les désirs naturel et nécessaires (manger, boire, dormir), les désirs naturels mais superflus (avoir de la bonne bouffe, de la bonne picole et un lit douillet), et les désirs qui ne sont pas naturels car on ne peut jamais les contenter complètement (soif de pouvoir, de richesse, d’immortalité).
Aucun plaisir n’est en soi un mal ; mais il en est dont les facteurs apportent bien plus de tourments que de plaisirs.
Et pour atteindre le bonheur, il faut se concentrer sur les plaisirs simple et s’entraîner à ne désirer que le minimum, le reste n’étant du coup que du bonus. Le plaisir ultime qu’on peut atteindre et de se contenter du pur plaisir d’exister.
Une physique et une métaphysique au service du plaisir
Pour supporter cette éthique de la recherche du plaisir et le rejet de la souffrance, Epicure a définie une vision du monde qui permet de se conforter dans cette recherche du plaisir.
C’est une métaphysique qui nous dit de ne craindre ni la mort (puisque après nous ne sommes rien, donc ne souffrons pas) ni les dieux (qui n’ont aucune influence sur nos vies).
Et c’est une physique atomiste: un monde de hasard, un monde absurde, qui ne suis aucun plan ni but et dans lequel tout ne peut pas être prédit d’avance; Une alternative à la vision d’un dessein intelligent, d’un ordre du cosmos des Stoïciens (ou des chrétiens).
Personnellement j’apprécie cette vision des choses. Elle est plus proche de ma métaphysique personnelle (et selon ma compréhension peut aussi correspondre à une interprétation de la physique quantique). Je trouve aussi qu’il y a des choses intéressantes chez les stoïciens mais plus dans leur éthique ou leur pratique (mais par contre notez bien que je ne dis rien de positif sur les chrétiens hein).
La recherche de la connaissance
C’est un des points un peu plus approfondit dans ce livre, notamment dans la seconde lettre. La connaissance est un plaisir pour Epicure, c’est aussi une nécessité pour s’affranchir des mythes et des craintes inutiles.
Ne peuvent se délivrer de la crainte à l’égard des questions vraiment fondamentales ceux qui ne connaissent pas la nature de l’univers, mais qui continuent de s’inquiéter de ce que racontes les mythes. Aussi n’est il pas possible sans l’étude de la nature de goûter les plaisirs à l’état pur.
Dans la lettre à Pythoclès, l’explication des phénomènes céleste sert de support à la démonstration du processus de recherche de la connaissance épicurien. D’ailleurs la connaissance n’y est pas recherchée pour elle même, mais pour « l’absence de trouble » qu’elle procure (donc le but est pas nécessairement de savoir, mais de kiffer). Le principe repose sur l’idée de la « pluralité des causes » (accepter plusieurs explications possibles) d’une part et sur le fait de ne pas rentrer en conflit avec les « faits évidents ».
Si en effet l’on entre en conflit avec les faits évidents, on ne sera jamais en mesure de participer à une authentique absence de trouble.
Au final même si ca n’est pas une méthode scientifique rigoureuse, il y a quelques côtés un peu similaires tout de même. Notamment l’idée de ne pas accepter de façon définitive une seule explication (et de généralement repousser les explications « magique » ou « divine »).
Parmis les opinions, selon Epicure, certaines sont vraies, et certaines fausses. Sont Vraies celles qui sont attestées par l’évidence et celles qui sont non contestées par elle
L’idée de confronter les explications possibles à un certain principe de réalité pour éventuellement écarter certaines explications est intéressante également. Même si ici évidement le terme d’évidence pose problème.
Plaisirs et vertus
Pour Epicure, le plaisir est la seule métrique par lequel il faut juger nos actes. Une vie vertueuse n’est qu’un moyen pour atteindre le plaisir.
C’est encore pour le plaisir que l’on choisit les vertus
Je trouve cette idée plutôt en ligne avec ce que je pense: Ne pas s’illusionner à croire que nous sommes autre chose qu’égoïste. L’altruisme, les vertus, ne sont que des moyens de s’auto-satisfaire soit directement en améliorant notre propre image de nous même, soit indirectement en récoltant les fruits de nos bonnes actions. Ca ne veut pas dire pour autant qu’il y aurait plus de plaisir à être purement égoïste, nous sommes câblés pour être des animaux sociaux, et il est donc logique qu’on prenne aussi du plaisir à aider les autres.
L’Importance de l’amitié
Enfin si la philosophie d’Epicure semble centré sur le plaisir, ne faisant cas ni des dieux, ni d’un éventuel destin, ni des vertus. Elle laisse tout de même une place spécifique à l’amitié.
Il est plus important de considérer avec qui l’on mange et l’on boit que ce que l’on mange et l’on boit, car manger de la viande sans la compagnie d’un ami, c’est une vie de lion ou de loup.
A la base bien sur l’amitié est comme les autres plaisirs: c’est un plaisir calculé. Il faut choisir des amis en fonction de ce qu’ils peuvent nous apporter.
N’est un ami, ni celui qui recherche l’utilité en toutes circonstances, ni celui qui ne l’associe jamais à l’amitié. Le premier, en effet, se sert du service rendu pour faire du petit commerce avec les dons réciproques, tandis que l’autre brise l’espoir d’un avenir favorable.
Mais l’amitié a tout de même un statut à part. Elle est même mise à presque à égalité avec la sagesse pour Epicure. L’utilité n’est pas toujours recherché dans l’amitié, et une fois qu’elle est établie elle dépasse potentiellement le simple calcul coût / bénéfice.
Bien que choisissant l’amitié en vue du plaisir, Epicure a dit qu’il accepte les plus grandes souffrances dans l’intérêt de ses amis.
Une vie de plaisir?
Voilà en gros ce que j’ai compris de la philosophie d’Epicure. Accepter que nous sommes des animaux recherchant bêtement le plaisir. Ne pas s’inquiéter outre mesure des dieux, du destin, de la vertu ou de la mort. Se concentrer sur les plaisirs simples de la vie en délaissant ceux qui sont inatteignables ou qui d’une façon ou d’une autre nous coûteront trop de souffrance. Et compléter ça par une recherche de la connaissance et de l’amitié.
C’est pas si mal finalement, si ?